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8. 18 juillet 1984. Tu me dis que ma mort te rendrait folle.

 

Hyères, le 18 juillet 1984

Ma belle Source,
Je viens de lire (en anglais) une histoire atroce : celle d'une femme qui a perdu ses trois enfants. A chaque fois qu'un enfant naissait, il mourait quelque temps après d'une maladie (trois fois de suite donc !!!). Et cette femme a recommencé à avoir un quatrième enfant.

Vraiment, c'est inimaginable. Est ce que toi, tu te serais remise de la mort de trois petits aigles ?
J'en arrive à une certaine conclusion : cette femme est un légume, une pondeuse tout simplement. A moins que tu ne sois pas sincère quand tu me dis que ma mort te rendrait folle. Mais je ne mets pas en doute tes paroles belle Source. Je remarque tout simplement que tu as une sensibilité plus qu'exacerbée, que tu peux aimer certains individus aussi fort que s'aimaient Tristan et Iseult, belle Source.

Ce texte m'a à nouveau rapproché de toi. Tu peux d'ailleurs remarquer que c'est le cas de toutes mes lectures !

Je suis maintenant à Hyères, peinard. Je te remercie Source pour cet argent et les lettres. Mais je ne suis pas d'accord : je ne me confie pas à toi. Se confier, c'est raconter ses problèmes. Moi, je ne fais que te raconter des découvertes. Et puis, Anny et Odile sont aussi des personnes à qui je parle beaucoup. Je n'aime pas qu'on dise ça.


Madame la Source,
Je veux vous remercier pour votre belle lettre que je viens de recevoir. Sachez une chose: elles ne sont jamais trop longues. Elles sont toujours passionnantes. Pour cette question des femmes, nous en reparlerons volontiers quand nous nous reverrons.

Je me suis aperçue que papa a un violent mépris pour les femmes. Il les déteste, les trouve inférieures (physiquement, c'est évident) moralement. C'est incroyable comme j'ai été perméable à ses idées.

D'ailleurs, c'est formidable d'avoir eu autour de moi plein de personnalités différentes. J'ai complètement calqué sa personnalité, la tienne et celle d’Odile. J'essaie d'avoir ton imagination, ton courage, ta vivacité, le coté cool et reposé de papa, et la "lucidité" d’Odile.

A ceci, vous me répondrez que ces qualités sont peu nombreuses. C'est sûr. Je te parlerai plus en détail de vos qualités. Tu dois te dire aussi : "Et pourquoi ne parle t-elle pas de ma lucidité à moi ? parce que vous êtes une personne supérieurement intelligente mais qui est incapable de raisonner logiquement quand il s'agit de vos problèmes. C'est comme Anny. Pour tout ce qui est extérieur, elle garde une objectivité étonnante. Dès qu'un souci la touche, elle est aveugle, subjective, pleine de préjugés et son esprit logique est dévié par 1000 obsessions. Chez vous, une manie de la persécution, un certain mépris des hommes...

J'ai des centaines d'exemples en tête où vous avez fabulé à partir d'un problème simple.
Madame la belle Source, je suis super bien ici. Je fais du sport, c'est formidable.

Je vais vite envoyer la lettre pour que vous ayez des nouvelles de moi.
Ça me fait aussi super plaisir d'être avec vous en septembre (ou fin août) pour faire une indigestion de théâtre, cinéma, etc...

Je vous embrasse affectueusement.

Ariane

 
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